Les livres de Marie Peyrat, marquise Arconati Visconti, et d'Alphonse Peyrat
Les livres de Marie Peyrat, marquise Arconati Visconti
Le premier sous-ensemble est celui comportant les livres acquis par Marie Peyrat elle-même, dont la majorité est sans doute constituée de dons de leurs auteurs. Identifiables par leurs dates de publication et par des envois manuscrits ou mentions de provenance spécifiques, ces livres reflètent les centres d'intérêt et le réseau de la marquise ; certains de leurs auteurs sont des habitués de ses salons littéraire et politique.
Ainsi, en 1889, Joseph Reinach lui offre un volume de ses pamphlets antiboulangistes, accompagné d'un télégramme annonçant la condamnation du général ; en 1903, Anatole France lui donne un exemplaire de son Histoire comique, qu'il dédie à « Clio », surnom que donnaient à la marquise ses amis. D'autres documents traduisent son influence politique et intellectuelle : par exemple, trois livres d'Alfred Loisy sont dotés d'envois manuscrits montrant la reconnaissance de l'auteur pour celle qui avait soutenu la création de sa chaire au collège de France.
Plusieurs catalogues d'expositions d'objets d'art sont liés aux acquisitions que la marquise effectue dans ce domaine, sur les conseils de son ami Raoul Duseigneur. Enfin, quelques ouvrages reflètent ses loisirs personnels : son goût pour l'opéra de Wagner se traduit par la présence d'un livret de l'Or du Rhin, acommpagné de la mention manuscrite « Bruxelles 7 novembre 98 » ; de fait, la première représentation en français de cette œuvre a bien eu lieu au théâtre de la Monnaie en 1898.

Joseph Reinach, Télégramme adressé à la marquise Arconati Visconti, 14 août 1889, dans Bruno-le-Fileur, Paris, 1889. Bibliothèque Ulm-LSH, H F er 1179 F 8°

Anatole France, Histoire comique, Paris, Calmann-Lévy, 1903. Bibliothèque Ulm-LSH, L F r 188 N 12°

Victor Hugo, La légende des siècles, Paris, Calmann-Lévy, 1877. Bibliothèque Ulm-LSH, L F p 438 AA 8°
Les livres d'Alphonse Peyrat
Alphonse Peyrat, journaliste et sénateur républicain et anticlérical, proche de Gambetta et de Victor Hugo, avait constitué une bibliothèque personnelle, dont sa fille hérite à son décès en 1890. Parmi les livres aujourd'hui conservés à l'ENS, un seul comporte l'ex-libris gravé au nom d'Alphonse Peyrat. Cependant, il est évident que les livres provenant de lui sont bien plus nombreux. Par exemple, parmi les fleurons de la collection Arconati Visconti figurent huit ouvrages de Victor Hugo, dotés d'envois manuscrits dédiés à son ami : la Légende des siècles et L'art d'être grand-père, mais aussi des fascicules politiques de circonstance.
D'autres livres de la collection Arconati Visconti peuvent être rattachés à la personnalité d'Alphonse Peyrat ; des essais politiques qui lui sont dédiés par leurs auteurs, mais aussi un ensemble de documents concernant le régime de la presse française au XIXe siècle. Il est possible que certains livres d'histoire religieuse proviennent également du sénateur, auteur de plusieurs ouvrages de controverse ou de polémique sur le cléricalisme.
Il est donc très probable que l'ex-libris « Alphonse Peyrat » ne soit pas une marque de possession, mais un hommage rendu par la marquise à un père qu'elle vénérait, comme en témoignent de multiples exemples : en 1911, elle crée une « fondation Alphonse Peyrat » pour venir en aide aux agents de la préfecture de police blessés dans l'accomplissement de leurs fonctions ; en 1912, le nouvel Institut de géographie est dédié à la mémoire du sénateur ; en 1922 enfin, la marquise finance la création d'une « chaire Alphonse Peyrat » dont le titulaire est Lanson lui-même.
Il est enfin à noter que la marquise a fait relier en Belgique un certain nombre d'exemplaires de sa collection personnelle ou provenant de son père. Ces reliures, qui ne présentent pas de caractère bibliophilique, ont été réalisées par la veuve L. Bernard, sise 36 rue Bodeghem à Bruxelles.